Pyramide de Bolle: la plus haute falaise marine du monde et le miracle vivant d’un animal autrefois cru éteint
Imaginez : au XVIIIe siècle, vous naviguez sur un magnifique voilier, au cœur de la mer de Tasman entre l’Australie et la Nouvelle‑Zélande. Soudain, dans les flots, s’élève une ombre sombre et immense : une roche pointue qui semble toucher le ciel. C’est la Pyramide de Bolle, la plus haute falaise marine du monde, culminant à 562 mètres et mesurant environ 1 100 mètres de long pour 300 mètres de large. Autour, un petit halo d’îlots émerge à peine des vagues. Et pourtant, derrière sa silhouette spectaculaire se cache une histoire de survie: Dryococelus australis, connu aussi sous le nom de « phasme-arbre » ou « homard des arbres », que l’on croyait éteint depuis 1920. Ball’s Pyramid peut être le sanctuaire improbable de cette espèce.
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Une colonne basaltique née d’un volcan éteint
La Pyramide est constituée de basalte, roche volcanique solidifiée il y a des millions d’années. Entre 6,4 et 7 millions d’années, un volcan s’élevait au‑dessus des eaux et la lave s’est figée dans son conduit, formant une colonne qui deviendrait la structure actuelle. Le volcan s’éteignit ensuite. Avec le temps, le vent et la houle ont érodé les flancs et affiné le cœur, pour donner ce monolithe isolé des continents. On décrit parfois Ball’s Pyramid comme “un exemple éclatant de la penultième étape de l’aplanissement d’une île volcanique.”
Isolement et destin d’un microcontinent : Zealandia
Ball’s Pyramid se trouve à environ 600 kilomètres à l’est de l’Australie, dans la mer de Tasman. Son profil est un long demi‑monolithe mesurant 1 100 mètres de long et 300 mètres de large, entouré d’un ensemble d’autres rochers qui percent à peine l’eau. À seulement 20 kilomètres au nord se dresse l’île Lord Howe, plus grande et plus ancienne. Selon une hypothèse nouvelle, Ball’s Pyramid, Lord Howe et d’autres îlots forment les derniers points émergés d’un continent submergé — Zealandia. Aujourd’hui, 94 % de ce continent est immergé sous les eaux du Pacifique, et Ball’s Pyramid demeure l’un des rares fragments de cette ancienne terre qui surplombe encore les flots.
Découverte et nomination
En 1788, le capitaine britannique Henry Lidgbird Ball repère ce rocher alors qu’il transporte des personnes vers l’île Norfolk. Il baptise l’étrange saillie de son nom et l’inscrit dans l’histoire des découvertes marines. Ainsi, la Pyramide de Bolle porte aujourd’hui le nom de celui qui l’a vue en premier — une nomination modeste qui a traversé les siècles.
Le sauvetage improbable : le phasme-arbre survit contre toute attente
Le Dryococelus australis, aussi appelé le « phasme‑arbre » ou le « homard des arbres », était considéré comme éteint depuis 1920. Autrefois vivant sur Lord Howe, il a trouvé refuge sur la Pyramide de Bolle, isolée du monde. En 1918, l’épave d’un navire a apporté des rats qui envahirent l’île et attaquèrent les palchnides. En 1960, quelques-uns furent retrouvés sur les flancs de Bolle, mais dans un état desséché. Ce n’est qu’en 2001 que 20 à 30 individus vivants furent redécouverts sur la Pyramide de Bolle. Ces palounes se nourrissent des feuilles du Melaleuca howeana, un théier endémique des îles Lord Howe, et leur survie dépend de ce lien écologique fragile. Cette histoire montre que même une roche inaccessible peut devenir un sanctuaire et conter l’histoire d’un continent perdu.