Dirndl: le vêtement folklorique allemand qui a été interdit, réformé et réhabilité — et qui, à l'origine, ne portait pas de sous-vêtements
Le dirndl est souvent présenté comme l’un des costumes féminins les plus célèbres d’Europe, mais son histoire est bien plus complexe que ce que l’on croit. Né dans les vallées alpines à la fin du XIXe siècle, il a traversé des périodes de réinvention et même d’interdiction. À l’origine, c’était une tenue paysanne simple: chemise, corset, jupe bouffante et tablier. Le nom vient de Dirndl, qui désigne une jeune fille ou une servante; l’ensemble est aussi appelé Dirndlkleid ou Tracht. Aujourd’hui, le dirndl est devenu un symbole fort de l’identité culturelle allemande et bavaroise, porté lors des fêtes et des célébrations.
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De la ruralité à la mode urbaine: la première popularité
Dans les années 1900, le dirndl gagne une popularité croissante en Allemagne et en Autriche-Hongrie: il est adopté par la population urbaine comme signe de fidélité à des racines germaniques. En 1910, Moritz et Julius Wallach, tailleurs et modistes juifs de Munich, offraient gratuitement une centaine de robes inspirées des costumes paysans bavarois à l’occasion du centenaire de l’Oktoberfest. Ce geste propulsa le dirndl sur la scène urbaine. Le dirndl devient alors une mode pour la ville, popularisée par l’intelligentsia et les visiteurs du festival.
Le dirndl à l’ère nazie: réinterprétation et propagande
Pendant la période nazie, le dirndl est instrumentalisé pour promouvoir une image de vie rurale prétendument « pure » et naturelle, opposée à la vie urbaine industrielle. L’appareil idéologique entreprend des modifications du dirndl: plus de col fermé, décolleté profond, manches plus courtes et jupe portée au genou. Cette version est utilisée comme symbole du « retour aux racines », censé être authentique et sain.
Après-guerre: chute puis renaissance dans les années 1960
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, le dirndl tombe en disgrâce à cause de son association avec le nazisme et l’idéologie qui s’y rattache. Dans les années 1950, le port du dirndl est souvent interdit ou fortement restreint dans certaines régions, considéré comme nostalgie du régime. À partir des années 1960, le dirndl renaît grâce au climat festif de l’Oktoberfest et au développement du tourisme: il devient la tenue habituelle des serveuses et de nombreuses participantes. Il se diffuse aussi dans le tourisme et chez les jeunes femmes travaillant dans le secteur; il demeure un marqueur culturel important du sud de l’Allemagne et des pays voisins.
Le dirndl aujourd’hui: identité culturelle, traditions et modernité
Aujourd’hui, le dirndl est largement utilisé non seulement en Bavière, en Autriche et en Suisse, mais aussi dans la diaspora allemande et dans les films et dessins animés inspirés de l’Allemagne bavaroise. Il est porté lors de fêtes et festivals, et parfois même dans un usage quotidien par des femmes rurales. Le dirndl classique était initialement sans sous-vêtements, porté sur le corps nu ou sur une chemise légère. Aujourd’hui, certaines femmes portent des sous-vêtements spéciaux: soutiens-gorge à encolure basse avec effet push-up et couleur blanche, conçus pour éviter les transparences. « Je porte le dirndl non seulement lors des fêtes, mais tout le temps. Comme une partie essentielle de notre identité culturelle allemande et pour rester connectée à nos racines », déclare Susanne Klatten, l’une des femmes les plus riches d’Allemagne.